jeudi 24 juillet 2014

Joël Dicker : La vérité sur l'affaire Harry Québert

Joël Dicker : La vérité sur l'affaire Harry Québert - Poche, de Fallois Eds, mai 2014 - roman français.

Joël Dicker, jeune écrivain suisse, écrit ici son deuxième roman, un véritable thriller qui a obtenu le Prix de l’Académie Française et le Prix Goncourt des Lycéens en 2012.
En 2008, un jeune écrivain, Marcus Goldman, souffrant du syndrome de la page blanche, vient rendre visite à Aurora dans le New Hampshire à son ancien professeur, Harry Québert, vieille gloire de la littérature américaine, célèbre pour son chef d’œuvre « Les origine du Mal », dans l’espoir que celui-ci l’aide dans son travail.
Mais à ce moment-là, la police fait une macabre découverte dans le jardin de Harry Québert : les restes de Nola Kellerman, adolescente disparue pendant l’été 1975. Les soupçons se portent évidemment sur Québert. Qui a tué Nola en 1975 ?
Marcus va refaire en parallèle de la police, l’enquête sur ce crime pour sauver son mentor et ami et prouver son innocence. Comme nous sommes aux Etats-Unis les avocats se mêlent tout de suite à l’enquête et ils vont découvrir des meurtriers potentiels : le pasteur, le chef de police et son adjoint, un chauffeur-peintre, un riche industriel, une propriétaire de restaurant et son mari…toute la petite société d’Aurora se trouve mêlée au crime…
Marcus fera de cette Affaire le sujet de son futur livre : il y a donc une histoire dans l’histoire puisqu’il reprend des passages du livre de Québert et situe son roman aux deux stades divers du drame.
Nous lisons les conseils d’écriture (un peu poncifs) que donne Harry Québert à son élève et des informations sur l’édition aux Etats-Unis. Nous découvrons les modes de vie d’une petite ville de l’Amérique profonde et nous suivons cette enquête à rebondissements inattendus avec de nouvelles énigmes à résoudre constamment.
C’est donc un bon thriller français, écrit par un Suisse, qui se passe aux Etats-Unis. Evidemment un peu long avec ses 663 pages mais vite lu car on a hâte de connaître la fin.


Jeanne Benameur : Profanes

Jeanne Benameur : Profanes - Poche Actes Sud, mai 2014 - roman français

Jeanne Benameur a remporté le grand prix RTL/Lire au printemps 2013 avec ce superbe roman et on le comprend en le lisant : « Etonnante démonstration de l’espoir retrouvé dans la compagnie des Hommes au moment où tout semble s’effondrer » dit Xavier Houssin dans Le Monde.
C’est l’histoire d’un chirurgien retraité, Octave Lassalle. A 90 ans, il décide de s’entourer de quatre « aides » d’âge, de milieu et de culture très différents pour l’assister à vivre ses « derniers temps »  dans une grande maison familiale. Chacun des personnages va l’accompagner et l’aider non seulement matériellement mais aussi moralement, tout en évoluant eux-mêmes dans leurs propres vies. Lui-même et chacun ont des secrets profondément traumatisants, des blessures, des angoisses, des peurs mais vont tous réagir et des « liens invisibles » se tissent et les aident à avoir l’optimisme et l’espérance nécessaires pour continuer la « lutte pour la vie ». Je n’en dis pas plus…mais chaque parcours est passionnant.
« Dans une langue incantatoire », l’auteur nous livre cinq portraits magnifiques « criants de beauté et de vérité » que l’on imagine sans aucune peine. Octave Lassalle trouve des « haïkus » (petit poème extrêmement bref venu de Japon) qui convient à chacun de ses 4 « aides ». Quelle écriture délicate et poétique !
A lire absolument pour rester optimiste !!!!


Julie Wolkenstein : Adèle et moi

Julie Wolkenstein : Adèle et moi - Poche gallimard, juin 2014 - roman français

J’ai beaucoup aimé ce livre et repense souvent à cette dame qui pourrait être ma grand-mère ou mon arrière-grand-mère. Je repense aux maisons familiales et à l’importance qu’elles prennent dans la construction mentale des enfants.
L’héroïne, divorcée, amoureuse à nouveau, écrivain (un double de l’auteur ???) découvre, en triant des papiers à la mort de son père, l’existence et la vie passionnante de son arrière-grand-mère Adèle et reconstitue sa vie dans le Paris et d’autres lieux des années 1870-1880. Julie Wolkenstein construit son roman autour d’un secret de famille que son héroïne découvre dans un « memorandum », signé d’une certaine tante Odette qu’elle rencontre et qui, de plus, lui donnera le journal d’une partie de la correspondance d’Adèle. « Julie Wolkenstein aime les intrigues à tiroirs, les coïncidences et les courts-circuits » nous dit un critique. Une maison à Saint Pair près de Granville sert de trait d’union entre Adèle et son arrière-petite-fille, notre héroïne.(On a envie d’aller voir ce village…)
L’ambiance des vacances familiales dans cette « villa » est extrêmement bien décrite ainsi que la vie parisienne et en campagne de l’époque.
J’ai aimé la façon d’écrire de l’auteur, son humour, sa drôlerie, la typographie même originale : les mots soulignés, les mots en italiques, les mots en lettres majuscules…
Certains critiques ont trouvé ce roman trop long mais en le lisant en vacances je me suis laissée portée par l’ambiance, par les descriptions des différentes époques, par la révélation du secret…

David Foenkinos : Je vais mieux

David Foenkinos : Je vais mieux - Poche Gallimard, mai 2014 - roman français

J’attends toujours avec impatience les romans de cet auteur si agréable à lire avec son humour extraordinaire. On se souvient de « La délicatesse », « Les souvenirs ».
Le héros de ce roman est victime d’un mal de dos qui bouleverse sa vie. Est-ce une conséquence de ses échecs familiaux, professionnels et de ses frustrations ?
L’auteur nous emmène dans une réflexion profonde du héros, qui, voyant tout s’effondrer autour de lui, va modifier certains comportements, ce qui amènerait une « rédemption »….
Ce roman étant écrit à la première personne, nous sommes plongés dans les pensées du personnage : « l’auteur décortique, comme il sait si bien le faire, les émotions et les sentiments amoureux » nous dit Valérie Trierweiler (Paris-Match). Cela nous donne droit à des pages sensibles et profondes sur des sujets-clefs de la vie d’un homme de 50 ans : relation avec le conjoint, relation avec les parents, relation avec les enfants. Tout est analysé…
Quelques paragraphes plein d’humour sur des épisodes de vie : sur les médecins et les salles d’attente, sur les artistes devant leur œuvre, sur les dentistes, sur les vieux couples. On rit et on sourit.
A lire pour un bon moment de détente ce livre « sensible, profond et résolument optimiste » (critique de Version Fémina)

Annie Butor : Comment voulez-vous que j'oublie Madeleine et Léo Ferre

Annie Butor : Comment voulez-vous que j'oublie Madeleine et Léo Ferré - Poche Lgf, mai 2014 - roman français

Etant « fan » de Léo Ferré (surtout de ses premières chansons), j’étais intriguée de lire le témoignage de sa belle-fille Annie Butor. Elle fut toujours considérée comme sa fille, ayant été  élevée par Léo ferré à partir de l’âge de 5 ans. L’auteur et Madeleine (sa maman) ont vécu avec le chanteur de 1950 à 1973. Annie Butor a donc passé son enfance et son adolescence avec le poète.
La première partie du livre est bouleversante : la vie au quotidien de ce couple et « leur fille » est une vie hors-norme et excentrique. L’auteur nous dit : « Léo ne semblait faire aucune différence entre le monde des adultes et le mien » : son enfance est donc au milieu d’adultes. La petite fille est mêlée à leur vie, leurs problèmes financiers, la création des chansons, leur amour, leur vie de bohème.  L’auteur nous fait un portrait émouvant de son beau-père et de sa mère, deux êtres exceptionnels. La « Jolie môme » décrit les débuts difficiles, le succès, la gloire du chanteur mais surtout l’amour fou qui lie sa mère et Léo ainsi que l’amour et l’affection qu’il donnait à l’auteur. On apprend pour quelles occasions et circonstances ont été écrites la plupart des chansons, quelques paroles et poèmes étant retranscrits régulièrement ce qui rend la lecture très agréable. L’auteur nous dit « Ma mémoire est faite de chansons. Les chansons de Léo, je les ai vues naître, au jour le jour, je devrais dire plutôt nuit après nuit ».
La deuxième partie donne froid dans le dos : c’est la descente aux enfers de ce couple mythique : « Avec le temps va, tout s’en va »…. Comment Léo Ferré a-t-il pu devenir un homme si minable ?
Annie Butor reste juste et le récit n’est pas un règlement de compte mais un hommage à sa mère qui a tant aidé le chanteur. C’est aussi une reconnaissance de l’amour que lui a prodigué Léo Ferré.
Très beau témoignage, intéressant particulièrement pour ceux qui connaissent un minimum de chansons de Léo Ferré. « C’est extra », « Titi d’Paris », « C’est la vie » « Jolie môme », une soixantaine de chansons sont citées….