vendredi 30 mars 2012

Valentine Goby : Banquises

Valentine Goby : Banquises - Albin BanquisesMichel,2011- roman français

Sarah a disparu dans le Grand Nord il y a 28 ans. Depuis, aucune nouvelle. Lisa, sa sœur et l’héroïne de ce roman, devenue adulte, mariée et mère de famille, part sur ses traces. C’est l’occasion pour l’auteur de nous faire une profonde réflexion et étude sur la disparition : comment vivre avec l’absence non-expliquée de quelqu’un de proche.
Le roman se situe sur deux époques : le moment de la découverte de la disparition de Sarah et le moment actuel où Lisa en allant sur les traces de sa soeur découvre aussi  la disparition imminente des terres du Groenland.

Le désespoir des parents de Sarah est extrêmement bien décrit et le vécu de ce père et de cette mère est poignant, le travail de deuil étant rendu impossible par le fait de l’ignorance et l’attente est intolérable. « Les blessures qui ne se referment jamais » (nous dit Alexandre Fillon) sont présentes tout au long du récit. Tout père ou mère ressent, à la lecture de ces pages, l’angoisse et la tension de ces parents qui veulent espérer un retour de leur enfant : Sarah est majeure, elle a le droit de disparaître….
La perturbation et le processus d’effacement de Lisa, adolescente à l’âge du drame, sont bien sentis et bien explorés : notre auteur ne l’a-t-elle pas vécu ?

Se greffe à ce drame familial le drame du réchauffement climatique que nous décrit l’auteur avec beaucoup de réalisme : « s’il n’y a plus de banquise, on ne vit plus là-bas au Groenland. », nous dit-elle. Le Grand Nord est merveilleusement décrit mais la découverte de ce « territoire dévasté » et d’une population en sursis dans ce pays en perdition ne laisse pas beaucoup d’espoir.
 Le voyage qu’a entrepris Lisa est initiatique, presque mystique : mettre ses pas dans ceux de sa sœur. Va-t-il l’aider à retrouver une certaine sérénité et à se reconstruire en acceptant le deuil et son propre passé.

L’écriture est originale et déstabilisante : certaines phrases sont à l’envers, les virgules remplaçant les points ou le contraire !!!

On reste sur une impression de beauté, beauté des sentiments, beauté des paysages, mais aussi de mélancolie, de désenchantement et de tristesse…

Didier van cauwelaert : Le jounal intime d'un arbre


Le journal intime d'un arbre
Didier Van Cauwelaert : « Le journal intime d’un arbre » - Michel Lafon, 2011 - roman français
Tristan est un poirier planté sous Louis XV et déraciné lors d’une tempête 300 ans plus tard. Il nous raconte sa vie à travers les drames et les bonheurs dont il a été le témoin, le symbole ou la cause. Il continue après son déracinement à survivre grâce à une sculpture faite dans son bois.

Nous allons connaître son dernier propriétaire, une petite voisine autiste se confiant à notre arbre, un spécialiste des arbres qui veut inscrire Tristan sur la liste des Arbres célèbres, une sorcière, un poète, des amoureux….le tout se passant des guerres de religion à la Révolution française, de l’affaire Dreyfus à l’Occupation.

Ce livre d’une grande qualité littéraire et très original nous apprend beaucoup sur le règne végétal : on ne regardera plus les arbres de la même façon après la lecture de ce beau récit : « L’auteur nous invite à travers le regard d’un arbre à penser la vie autrement » nous dit un critique de la FNAC.

Bernard Déscampiaux : Lettres aigues et accents graves


Bernard Descampiaux : Lettres aigues et accents graves – The BookEdition,2011- Récit de vie
Superbe témoignage d’un ami qui a eu la polio lorsqu’il était petit garçon.

Par des lettres écrites aux personnes et choses qui l’ont entouré (par exemple : à un album à colorier, au père Noël, à l’instituteur, à Zorro, à une maman désemparée, à la piscine en fête, à la souffrance, à la solitude, à Jean-Marie), Bernard Descampiaux nous émeut au plus profond de nous-mêmes.

Il présente ainsi son livre :

" Il était une fois un petit garçon semblable aux autres qui aimait vivre, courir, jouer et faire le clown. Mais il est des enfances qui se brisent avant que d’être pleinement. Une nouvelle trajectoire de vie s’impose alors. Forcément.
Il était une fois un homme s’avançant vers la dernière partie de sa vie.Un homme qui regarda ce jeune garçon.Un Homme qui se mit à écrire des lettres. Il parait que ce qui est écrit, demeure.
Ces lettres, les voici. »

Pour se procurer ce livre, Tapez sur Internet le titre du livre : cela vous envoie à « TheBookEdition » et vous pouvez commander le livre pour 12 euros.

Julien Blanc-Gras : Touriste

Julien Blanc-Gras : Touriste - 2011, Ed Au Diable Vauvert - document

Difficile de raconter « Touriste » : ce sont des réflexions d’un Globe-Trotter, d’un touriste un peu à-part, sur le monde qu’il a parcouru dans tous les sens, sur les lieux magnifiques, sur les gens rencontrés, sur les autres touristes, sur les autres voyageurs comme lui, sur les moyens de transports.
Voici quelques exemples : on se régale et on rit et sourit avec les drôles de situations qui lui arrivent, avec les anecdotes rigolotes, avec sa description des « allemandenshorts ». On médite sur sa réflexion : « Dieu m’intéresse surtout pour ce que les gens en font ». On admire la beauté des paysages qu’il traverse et l’image des Surfers à Hawaï : « Ces types consacrent leur vie à la beauté du geste dans un dépassement de soi photogénique ».

Ce journaliste-voyageur s’intéresse aux autres et à l’histoire des lieux et son témoignage est très intéressant et original.

Malgré un style un peu trop journalistique, ce récit est drôle et intelligent, ponctué de bons mots, léger mais parfois profond, d’un humour désabusé.
Quelle détente et quelle envie il nous donne de partir en voyage !

Antoine Choplin : Le héron de Guernica


Antoine Choplin : le Héron de Guernica - Ed Le Rouergue - 2011 - roman français

En Espagne, le 26 avril 1937, près d’un marais, Basilio, « jeune peintre autodidacte », est en train de peindre un Héron cendré (sa passion) quand soudain des avions bombardent sa ville proche, Guernica. De retour au milieu de la tragédie, il cherche les personnes aimés : un oncle handicapé, un fermier chez qui il travaille (qu’il retrouve) et sa petite amie (qu’il ne retrouve pas). Un curé ami lui demande de prendre des photos des ruines et de la catastrophe. Comment représenter l’horreur de la tragédie dans le « cadre limité de la plaque-photo » ? Comment représenter un héron en peinture ? Comment Picasso a-t-il peint Guernica ? Se pose ici la question de la représentation et du témoignage.

Plus tard, notre jeune héros se retrouve à Paris devant le tableau  de la représentation du massacre de Guernica, cette œuvre magistrale de Picasso. Quelque chose de fort et d’intense passe entre le peintre Picasso lui-même et Basilio, côte à côte, devant l’immense peinture.

D’une écriture poétique, limpide et sensible, Antoine Choplin « écrivain talentueux et discret » nous fait vivre ses instants et ses événements avec beaucoup de pudeur. Très beau livre-conte plein d’émotions qui a reçu le Prix du roman Fnac 2011.